W-A Bouguereau représente Amour et Psyché sous les traits de jeunes enfants

Peinture à l'huile,71x119.5cm de William Bouguereau réalisée en 1890, collection privée. Représentation du mythe d'Amour et Psyché enfants. Le baiser.

Amour et Psyché, enfants, William-Adolphe Bouguereau, 1890

Pour compléter le cycle consacré à la représentation  »explicite » du mythe d’Amour et Psyché, William-Adolphe Bouguereau a choisi de représenter l’épisode du baiser de l’Amour.

Il apparaît cependant qu’il en ai fait sa propre interprétation en représentant les deux protagonistes non pas adultes, conformément à la tradition littéraire, mais enfants. S’inscrivant de même en faux par rapport à la tradition iconographique de l’épisode, dont nous pouvons donner un exemple : il s’agit de la sculpture d’Antonio Canova (1800), conservée au Louvre et que nous avons déjà évoquée dans un article consacré à l’Amour dans ce muséeainsi que dans l’article consacré à la représentation traditionnelle du mythe.

Comment peut donc s’expliquer cette interprétation de Bouguereau ?

Il est possible d’y voir une référence à l’interprétation donnée par les peintres Italiens dans la représentation de l’Amour. Vous retrouverez ce thème traité dans l’article consacré à la représentation d’Amour à la Renaissance.

Ensuite, ce mythe est signifié dans deux oeuvres représentant Cupidon accompagné d’un papillon : Cupidon et le papillon de 1888 et le Captif de 1891.

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Cupidon et le Papillon, 1889

En effet, le papillon représente Psyché et notre article consacré à la symbolique du mythe, ainsi que celui consacré à la représentation de Psyché permettront sûrement d’éclaircir ce point.

Enfin, cette représentation par Bouguereau n’est pas inédite, il est possible de mettre en parallèle ces tableaux avec une oeuvre dont nous avons déjà discuté dans l’article consacré à l’Amour au Louvre :  L’Amour, Antoine-Denis Chaudet.

Bouguereau s’inscrit donc là aussi (comme pour les oeuvres traitant de lAscension vers l’Olympe), dans une certaine tradition iconographique, de la représentation d’Amour et Psyché.

Bouguereau peint Amour et Psyché s’envolant vers l’Olympe

William-Adolphe Bouguereau, pour aborder le mythe d’Amour et Psyché, a choisi de privilégier essentiellement un épisode ; il peint, entre 1887 et 1895, quatre tableaux traitant de l’enlèvement de Psyché, et de son acheminement vers l’Olympe.

Dans le tableau de 1889, cette destination, le royaume divin, est clairement signifiée par l’index, pointé vers le ciel, d’Amour.

Cupidon et Psyché, WB, 1889, Hobart Art Gallerie

Psyché et Cupidon, William-Adolphe Bouguereau, 1889

De plus, l’intérêt de cet épisode réside en partie dans le fait qu’il soit  marqué par une interprétation philosophico-religieuse de l’acheminement de l’âme humaine vers le ciel, et de son union à l’amour divin, (voir l’article consacré à l’interprétation du mythe ). Et cette symbolique semble avoir inspiré notre peintre : si l’on observe le visage béat de Psyché, dans son enlèvement de 1895, il ne manque pas d’évoquer l’Extase, apportée par  »son union intime avec la divinité » (voir définition ).

L'enlèvement de Psyché WB 1895

L’enlèvement de Psyché, William-Adolphe, 1895

La société Sotheby’s, en 2010, a mis aux enchères simultanément deux tableaux traitant du mythe d’Amour et Psyché, un par Bouguereau, l’autre par Gustave Courbet, et à cette occasion une vidéo a été réalisée par Polly Sartori (Vice présidente de la Gallerie et chef du département des peintures, dessins et sculpture Européens du XIXème siècle), que nous avons choisi de vous présenter.

Si cette vidéo a été initialement réalisée dans un but lucratif, son principal intérêt pour nous réside dans la comparaison effectuée entre les deux peintres français du XIXème siècle, dans le traitement d’un même sujet.

Au delà d’une analyse iconographique du mythe, la vidéo aborde le thème de la représentation de la femme nue, de l’ interprétation érotique du sujet mythologique par les peintres du XIXème siècle ; auxquels Bouguereau ne fait pas exception dans son interprétation du mythe de Psyché et que nous avons aussi décidé d’étudier dans un article consacré à cette problématique (dans lequel figure, en tête, le tableau, Amour et Psyché de 1899).

De plus, il faut souligner le fait que nombre d’artistes du XIXème siècle ont été inspirés par les sculpture de l’artiste Italien Antonio Canova, tel que cela nous est expliqué sur la notice de l’une de ses oeuvres conservées au musée du Louvre. Amour et Psyché y sont représentés adultes et complètement nus.

Il faut ajouter que Bouguereau s’inscrit aussi dans une certaine tradition iconographique, en raison de la présence de certains attributs dits  »traditionnels », tels que les ailes d’anges, pour Amour, et de papillon, pour Psyché ; parfois l’arc et les flèches de Cupidon (illustration ci dessous). Un  renvoi à nos différents articles consacrés à l‘iconographie traditionnelle de la représentation du mythe paraît de circonstance.

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L’amour Vainqueur, William-Adolphe Bouguereau, 1887

Pour conclure, dans un article paru le 3 septembre 1905, volume 16 n°3 de la revue anglaise « Brush and Pencil », (numérisé et mis en ligne, format PDF, sur la plate-forme Jstore), ce peintre et son art son encensés ; et, adoptant une logique biographique, l’auteur aborde un panel de problématiques liées à ses oeuvres.

Bien que son interprétation du mythe d’Amour et Psyché, n’y soit  pas ou peu abordé, l’article nous permet de cerner comment ce peintre, pourtant controversé (voir la réception des oeuvres et page sur le contexte artistique), est parvenu à concilier iconographie traditionnelle et attente du public  »moderne », dans le respect des règles académiques et de  »l’art Pompier ».

Bouguereau traite le thème de l’Amour

Au delà du mythe d’Amour et Psyché, William Bouguereau est un peintre français adepte des sujets mythologiques et allégoriques. Vous pouvez trouver sur le site JStor, un article en anglais issu du volume 16 n°3 de la revue « Brush and Pencil« . À travers cet article pour le moins élogieux vous pourrez découvrir la peinture de Bouguereau. Ainsi, il peint une série de tableaux consacrés au thème de l’amour, et il apparaît que les personnages que nous y trouvons aient un lien avec notre mythe d’Amour et Psyché.

Tout d’abord, les deux tableaux Amour avec épine et Amour mouillé  présentent le personnage d’Amour seul. Contrairement aux tableaux où le papillon est présent et que nous avons étudié dans l’article Bouguereau peint le baiser de l’amour, le mythe de Psyché n’est pas signifié.

Cupidon avec une épine, William Bouguereau, 1894

Cupidon avec une épine, William Bouguereau, 1894

Cependant, il apparaît que Bouguereau respecte une certaine iconographie traditionnelle, qui remonte à l’Antiquité, et qui connut de nombreuses modifications depuis la Renaissance ; nous avons étudié ce phénomène à travers trois articles : le premier consacré à la reprise des mythes antiques à la Renaissance, le deuxième concernant l’interprétation iconographique par les peintres de la Renaissance italienne et le dernier concernant la continuité iconographique au cours du XVIIème et XVIIIème siècles.

Amour, répond donc dans ces deux tableaux aux canons iconographiques traditionnels, mais il apparaît que Bouguereau en ait fait sa propre interprétation. Si l’on comprend aisément ce que veut signifier le tableau représentant amour avec une épine dans le pied, c’est bien moins le cas pour Amour mouillé.

Mais le personnage d’Amour n’est pas le seul à avoir fait l’objet d’une interprétation allégorique. En effet, Bouguereau a peint à plusieurs reprises la figure de Psyché, au sujet amoureux.
Les deux femmes de ces tableaux empruntent en effet les traits sous lesquels Bouguereau a choisi de représenter Psyché dans son tableau de 18.. (mettre lien et date).

Rêve de printemps, William-Adolphe Bouguereau, 1901

Rêve de printemps, William-Adolphe Bouguereau, 1901

De ce tableau, et L’éveil de l’Amour, le thème reste l’amour. Mais Bouguereau a choisi de représenter Psyché et non directement Amour. Elle est entourée de petits anges, des putti, dont nous avons étudié la signification dans l’article sur la Renaissance. Ainsi, la présence de ces anges, qui empruntent l’iconographie du personnage d’Amour, sont ici présent  pour souligner le thème amoureux du tableaux.  Même si le sujet de ces tableaux n’est pas à proprement parler une représentation du mythe d’Amour et Psyché, il le sous entend fortement. Nous vous renvoyons pour cela à notre article sur l‘iconographie de ce mythe , et à  l’ouvrage L’espace de l’Eros: Représentations textuelles et iconiques étudié dans ce même article.

Pour conclure, il nous faut écarter une confusion bien souvent rencontrée au sujet d’un tableau :

Flora et Zephyr, William Bouguereau, 1875

Flora et Zephyr, William Bouguereau, 1875

En effet, ce tableau est souvent interprété comme représentant le mythe d’amour et Psyché, en partie à cause de la présence d’ailes de papillons. Mais, ces ailes ne sont pas portées par la femme, mais par l’homme. Cette incohérence par rapport à l’iconographie traditionnelle du mythe  et sa symbolique, nous a interpellée. Après un certain nombre de recherches, ils apparaît que les deux personnages ne sont pas Amour et Psyché mais deux autres figures mythologiques : Zéphyr et Flora.
Si le Dieu Zéphyr est un protagoniste du mythe de Psyché, il semble tout de même que l’épisode représenté par Bouguereau dans ce tableau ne soit sans rapport avec ce dernier. Hormis peut être le fait qu’il représente l’amour entre deux jeunes personnages mythologiques.

Amour et Psyché, illustration d’un mythe

L'Amour et Psyché, François-Edouard Picot, 1817

L’Amour et Psyché, François-Edouard Picot, 1817

Le mythe d’Amour et Psyché a été souvent utilisé par les artistes, que ce soit en peinture, en sculpture ou même en tapisserie. Il permet de représenter un couple amoureux : une femme d’une grande beauté accompagné d’un dieu. Faisant l’objet de nombreuses interprétations, ce mythe permet d’évoquer des sujets tels que l’amour véritable, le mariage, la séparation des amants et les épreuves à surmonter pour retrouver l’être aimé. Il permet également aux artistes de réaliser des œuvres empreintes d’une grande sensualité et d’un érotisme certain.

Pour bien aborder l’iconographie d’Amour et Psyché, nous vous conseillons l’ouvrage L’espace de l’Eros : Représentations textuelles et iconiques sous la direction d’Eduardo Ramos-Izquierdo (Professeur de Littérature contemporaine à l’Université Paris-Sorbonne) et de Angelika Schober (professeur en Lettres et Sciences Humaines à l’université de Limoges), rassemblant les actes du colloque du même titre s’étant déroulé du 26 au 28 mai 2005. A la page 34 du livre numérique (dont certaines parties ne sont malheureusement pas consultables en ligne), vous trouverez le chapitre De la tapisserie à la peinture : le didactisme de l’image au sujet de la légende de Psyché et Cupidon où est retracé l’histoire du thème d’Amour et Psyché en art avec une série d’exemples représentatifs. On y apprend par exemple que l’épisode de la découverte d’Eros par Psyché connaît un grand succès en Europe depuis la Renaissance.

Psyché découvre Éros, Benedetto Luti, 1720

Psyché découvre Éros, Benedetto Luti, 1720

L’iconographie du baiser d’Amour et Psyché est également très usitée. Le programme multimédia réalisé par le musée du Louvre en décembre 2010 : Psyché ranimée par le baiser de l’Amour, autour de la sculpture d’Antonio Canova permet de s’en rendre compte. On trouvera également des tableaux tels que Psyché et l’Amour de François Gérard, ou Amour et Psyché enfants de William-Adolphe Bouguereau.

Sur son blog anglais Visions of Whimsy, une jeune diplômée de Licence en Littérature anglaise, films et télévisions (University of Queensland) a écrit un article intitulé The Story of Eros and Psyche où elle liste bon nombre d’œuvres de toutes époques autour de la représentation de ce mythe. Elle illustre de cette manière le mythe, épisode par épisode, de diverses peintures et gravures.

Sur notre Flickr, vous trouverez différents albums rassemblants des représentations du mythe d’Amour et Psyché, que ce soit des œuvres du XIXe siècle présentants l’histoire du couple, puis plus spécifiquement les œuvres de William-Adolphe Bouguereau. En complément, vous trouverez également la série The Story of Psyche de Maurice Denis datant du  début du XXe siècle.

La représentation de Psyché en peinture

Peinture à l'huile,71x119.5cm de William Bouguereau réalisée en 1890, collection privée. Représentation du mythe d'Amour et Psyché enfants. Le baiser.

Amour et Psyché enfants, William-Adolphe Bouguereau, 1890

Quand la figure d’Amour/Eros est relativement fluctuante au fil du temps, celle de Psyché n’admet que peu ou pas de variation. Plus que l’évolution de son iconographie, c’est davantage la représentation même de la femme en peinture qui va se modifier au fil des siècles. C’est donc dans les Métamorphoses (ou l’Âne d’or) d’Apulée (auteur berbère du IIe siècle avant J.-C.) qu’est intégré le Conte d’Amour et Psyché. Psyché, la femme dont Amour est tombé amoureux et qu’il épouse par la suite, est parfois représentée seule, mais de préférence en compagnie de son époux Amour.

Dans ce Recueil d’Antiquités de Antoine Mongez (archéologue et historien de l’art du XVIIIe siècle) et Marie Joséphine Angélique Mongez (sa femme artiste peintre) paru en janvier 1804 chez Agasse, on trouve en particulier quelques paragraphes consacrés à Amour et Psyché (page 10).

Dans l’ouvrage sous la direction d’Eduardo Ramos-Izquierdo (Professeur de Littérature contemporaine à l’Université Paris-Sorbonne) et de Angelika Schober (professeur en Lettres et Sciences Humaines à l’université de Limoges) rassemblant les actes du colloque consacré à l’Espace de l’Eros : représentations textuelles et iconiques (26 au 28 mai 2005), on trouve un chapitre intitulé De la tapisserie à la peinture : le didactisme de l’image au sujet de la légende de Psyché et Cupidon (page 35). Est abordé naturellement la question de la représentation de Psyché dans les arts, que ce soit en sculpture, peinture ou tapisserie.

Le programme multimédia réalisé par le musée du Louvre en décembre 2010 : Psyché ranimée par le baiser de l’Amour, permet de retracer l’histoire de Psyché à partir de ses nombreuses représentations.

Plus que l’épouse d’Amour, Psyché est également la personnification de l’âme et est associée au papillon (en grec « Psukhê«  signifie « papillon » ). C’est pour cette raison qu’elle est souvent représentée avec des ailes de papillon ou avec un papillon comme on peut le voir dans les œuvres suivantes : Le réveil de Psyché (salon de 1904) de Guillaume Seignac et Psyché ; elle revient des enfers rapportant à Vénus la boîte qui lui a donnée Proserpine (salon de 1859) de Paul-Alfred de Curzon.

Néanmoins, elle est parfois également représentée seule et sans ses ailes de papillon. Dans ces cas-là, seul le titre du tableau permet souvent l’identification. C’est le cas dans Psyché abandonnée (1795) de Jacques-Louis David ou dans cet autre tableau de William-Adolphe Bouguereau :

Psyché, William-Adolphe Bouguereau, 1892, huile sur toile, 65 x 107 cm, collection privée

Psyché, William-Adolphe Bouguereau, 1892

Mais l’iconographie la plus fréquente est toujours celle où Amour/Eros est présent à ses côtés, qu’elle ait ou non ses ailes de papillon. Etant le seul amour du Dieu, il est difficile de faire erreur. On pourra prendre en exemple L’Amour et Psyché (1817) de François-Edouard Picot et Psyché et l’Amour (salon de 1798) de François Gérard.

Cependant, la confusion avec le couple Zéphyr/Flore est parfois faite à cause des ailes de papillon de Zéphyr, notamment dans Flora et Zephyr (1875) de William-Adolphe Bouguereau, intitulée parfois à tort Amour et Psyché.

Pour davantage d’illustrations, nous vous renvoyons aux albums Amour et Psyché par Bouguereau et Amour et Psyché au XIXe siècle présents sur notre Flickr.

Amour aux XVIIe-XVIIIeme siècles

Nous allons uniquement retenir ici, d’après l’article de George Brunel (conservateur des objets d’art des églises de la Ville de Paris), Amour, sur l’Encylopédie Universalis, que durant les siècles qui suivirent la Renaissance, la représentation d’Amour connût une certaine simplification concernant sa portée symbolique.

 »A l’époque des Lumières, la joie et le malheur, l’ivresse sensuelle et l’extase mystique ne s’expriment plus par les détours de langage qui plaisaient aux hommes de la Renaissance et de l’âge classique »

Les artistes de ces XVIIème et XVIIIème siècles s’inspirèrent donc, tout en les simplifiant, des oeuvres de la Renaissance (voir l’article sur le mythe d’Amour dans la peinture renaissante), qui elles-même puisaient leur inspiration dans l’iconographie antique.

François Boucher, par exemple, reprend en 1742 le thème de l’éducation du Dieu.

Un dossier consacré à cet artiste roccoco est disponible sur le site de l’Académie de Strasbourg, écrit par Aurélie Martin-Chrismann et Paul-Henri Clavier (professeurs au Lycée Pasteur de Strasbourg). Il présente un certain nombre de ses oeuvres, dont « l’Education de l’Amour », dans lesquelles, lorsqu’elles ont attrait à un thème mythologique, la présence de Cupidon est récurrente.

Amour apparaît parfois aussi adolescent comme dans le tableau de Bartolomeo Manfredi :

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Le Châtiment d’Amour, Bartolomeo Manfredi, 1605 – 1610

Il peut de même être représenté accompagné de son frère et opposé, Anteros ; avec qui il se dispute, enfant, comme dans la sculpture d’Alessandro Algardi (1630), ou par qui il est parfois puni une fois adulte, comme a choisi de le représenter le peintre Sebastiano Ricci en 1706 dans La Punition d’Amour.

Une notice de la première oeuvre, représentant Eros et Anteros se battant enfant  est disponible ( en anglais) sur le site de la Collection Lichtenstein, où il est conservé, et apporte un certain nombre d’informations concernant l’antagonisme de ces deux personnages.

Les groupements de putti sont de même repris par les artistes : à la mode roccoco pour Jean-Honoré Fragonard.

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Essaim d’Amours, Jean-Honoré Fragonard, 1766

‘Belle omelette… fricassée d’anges » Denis Diderot, Critique du Salon de 1767

Pour finir, le peintre Eustache Le Sueur, en 1646-1647, peint un cycle sur l’histoire d’Amour, pour l’hôtel Lambert à Paris, maintenant conservé au Louvre et consultable sur le site du Musée.

‘l’un des cycles les plus complets racontant l’histoire de l’Amour » Georges Brunel.

Ainsi, le personnage du Dieu de l’Amour semble, durant ces siècles se prêter parfaitement, à la fois à la violence et l’agitation baroque, lorsqu’il incarne la passion amoureuse ; ainsi qu’à la douceur et la mièvrerie des oeuvres roccoco.

Amour au Louvre

Le personnage d’Amour a beaucoup inspiré les artistes.

Au Musée du Louvre, sont présentes un grand nombre d’œuvres en lien avec ce Dieu. Vous pouvez donc consulter ces oeuvres, classées selon leur localisation dans le musée, sur le cartel ; on trouve donc quelque 207 œuvres, dont le titre contient les termes  »Eros » ou  »Cupidon », allant de l’Antiquité au XIXème siècle.

De plus, le Musée a consacré un parcours à l’Amour, intitulé ‘‘Maudite Aphrodite, Histoire d’amours mythiques » , à travers certaines sculptures du Musée :

– étape 02 du parcours en question :

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L’Amour, Antoine-Denis Chaudet, Musée du Louvre

La notice complète de cette oeuvre, en dehors du parcours, est disponible sur le site du Musée du Louvre. Amour est représenté offrant une rose à un papillon, et fait ainsi référence au seul amour d’Amour : Psyché. Mais au-delà de cela, ce geste symbolise le grand paradoxe du sentiment amoureux :

« le papillon qui se laisse séduire par la rose de l’Amour symbolise l’âme, en grec, Psyché : déjà prisonnière de l’Amour, l’âme en ressent bientôt les tourments plus que les plaisirs »

Psyché fait aussi partie du parcours consacré par le musée puisque deux sculptures s’attachent au mythe de Cupidon et Psyché.

–  étape 03 du même parcours

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Zéphyr et Psyché, Henri-Joseph RUTXHIEL, 1814

– étape 11

Amour dans l’art de la Renaissance

Pour aborder ce sujet, nous allons partir de l‘article de Georges Brunel sur l’Amour, plus particulièrement de l‘extrait sur les représentations de l’Amour dans l’Art occidental. Cet article étant en accès restreint sur l’Encyclopédie Universalis, nous allons tenter de reprendre chacun des termes abordés, tout en les illustrant.

Pour l’auteur, Amour est à la fois un personnage déterminé, un dieu, fils de Vénus, mais aussi une  »personnification d’une notion abstraite et intemporelle ». Ceci aboutit donc, à la représentation d’un personnage Amour, ou de personnages, les Amours, qui signifient tous le thème amoureux de l’oeuvre. Ces derniers sont aussi appelés putti (littéralement,  »petits enfants ») et empruntent l’iconographie du dieu Amour.

Les putti les plus connus sont certainement ceux de la Madone Sixtine de Raphaël : ce sont deux jeunes enfants ailés.

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Madone Sixtine (détail), Raphaël, 1513-1514, Gemäldegalerie Alte Meister, Dresde

Un article (payant) sur la plate-forme Cairn info, est consacré par Bertrand Prévost (Professeur d’Histoire de l’art à l’Université de Bordeaux), à ce sujet, intitulé ‘‘La Danse des Putti », publié dans la Revue Critique, n°68, 2004.

En ce qui concerne la représentation du Dieu Amour, les artistes se sont confrontés à une certaine difficulté :

  »Comment prêter à l’Amour des émotions ou des traits de caractère particuliers, alors qu’il est l’incarnation de la plus puissante des passions ? »

Ainsi, Cupidon apparaîtra dans les tableaux (au sujet  »profane ») où le thème est l’amour, avec sa mère ou d’autres Dieux ; par exemple dans le tableau de Botticelli, Le Printemps 

Le Printemps, Sandro Botticelli, 1482

Le Printemps, Sandro Botticelli, 1482

Ici il est accompagné de sa mère Vénus et des trois Grâces, sur la gauche. Ces dernières, suivantes de la Déesse, sont réputées comme étant les  »éducatrices » d’Amour. L’article Wikipédia consacré à cette oeuvre apporte quelques informations supplémentaires pertinentes sur Cupidon, ainsi que sur l’ensemble du tableau.

 Ceci  nous permet d’aborder le second thème à travers lequel les artistes de la Renaissance ont choisit de représenter le Dieu : l’Education d’Amour.

L'éducation de l'Amour, le Corrège

L’éducation de l’amour, Le Corrège, vers 1525

Ce tableau possède un pendant, qui se trouve au Louvre, Vénus et Cupidon découverts par un satyre, dont la notice est disponible sur le site du Musée, et qui illustre bien la complexité iconographique des tableaux de la Renaissance, dont l’auteur George Brunel dit qu’elle se simplifiera à partir du XVIIème siècle.

Dans un autre tableau fondé sur ce thème, l‘Education de l’Amour par Titien, nous pouvons voir Venus en train de bander les yeux d’Amour. Pour comprendre cette interprétation, l’attribution d’un bandeau à l’Amour dans un certain nombre de représentations, un article sur la plate-forme Persée est disponible, intitulé Le Couple divin ou l’éducation de l’amour dans les masques Jonsoniens, paru en 1987, dans le volume 25 de la Revue de la société d’études anglo-américaines des XVII-XVIII siècles. L’auteur ici, Marie-Claude CANOVA-GREEN (Ancien Professeur de littérature à la Sorbonne-Nouvelle et au Goldsmith College de Londres), aborde différentes problématiques attachées à cette éducation de l’Amour, dans les Arts, chez Titien par exemple, partant de l’interprétation par le dramaturge du XVIIIème siècle Bejamin Jonson.

En effet, il apparaît que les artistes aient donc recours, tout comme leurs contemporains écrivains, à une moralisation du thème mythologique (voir article sur la redécouverte des mythes antiques). Pour George Brunel il s’agit de la dimension  »sacrée » de la représentation de l’Amour dans l’Art. Les tableaux vu précédemment à titre d’exemple de sujets profanes, ne sont pas nécessairement exclut de ce champ de représentation puisque leur portée symbolique est en fait reliée à des dogmes religieux principalement.

Nous pouvons prendre comme exemple un tableau où cette dimension est plus évidente , l’oeuvre de Titien : Amour Sacré et Amour Profane.

Ou encore, Cupidon se plaignant à Vénus, de Lucas Cranach l’Ancien, où l’artiste entend prévenir des risques de la luxure.

Ainsi, les artistes de la Renaissance sont parvenus à remettre au goût du jour le mythe d’Amour, s’inspirant de l’iconographie antique (voir l’article sur Amour dans l’Antiquité) tout en l’incorporant à une tradition moralisante, humaniste et platonicienne ; ils furent tant inspirés par ce thème qu’il nous serait impossible de faire encore une fois une liste exhaustive des oeuvres traitant du sujet.

En revanche, toujours sur le site du Louvre, nous pouvons trouver un certain nombres d’oeuvres, consacrées à Amour, dans les salles consacrées à la peinture italienne.

La redécouverte des mythes antiques à la Renaissance

Le Moyen-Age, dans le cadre de la représentation mythologique peut être considéré comme une période de déclin,puisque l’histoire de ces dieux païens est  mise de côté, au profil de sujets religieux.

C’est à partir du XIVème siècle qu’un certain nombre d’auteurs redécouvrent et reprennent ces textes antiques ; ils parviennent à les remettre au goût du jour en les réinterprétant à travers le prisme des dogmes chrétiens. Ce lien entre culture médiévale et nouvelle lecture des écrits antiques est étudié par Bernard Ribémont (Professeur d’Histoire littéraire médiévale à l’Université d’Orléans) dans son article « l’Ovide moralisée et la tradition encyclopédique médiévale » paru en 2002 dans la revue Cahiers de recherches Médiévales et Humanistes. Ce texte, l’Ovide Moralisée, ainsi que la tradition littéraire qui en naîtra sera une source d’inspiration pour les artistes de la fin du Moyen-Age et de la Renaissance. Un second ouvrage important du genre est à citer, la Généalogie des Dieux païens de Boccace (écrivain italien du XIVème siècle), paru entre 1347 et 1360, dont une traduction française numérisée est disponible sur la plate-forme Gallica de la Bibliothèque Nationale de France.

Ensuite, c’est durant les siècles dit de la « Renaissance », en Italie particulièrement, que cette relecture et redécouverte des textes Antiques est complétée par les dogmes humanistes et  néoplatonistes, ainsi que par un certain nombre de découvertes archéologiques contemporaines. (les deux définitions en liens renvoient au site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales)

Un ouvrage d’André Chastel (Historien de l’Art français, spécialiste de la Renaissance italienne) a été consacré à cette thématique de l’Art et de l’Humanisme à Florence au temps de Laurent le Magnifique, dont un article résumant les principales thématiques est disponible sur l’Encyclopédia Universalis, publié par Martine VASSELIN (Agrégée de lettres modernes et titulaire d’un doctorat en Histoire de l’Art des Temps modernes). A noter que les articles de cette plate-forme sont en accès restreint.

Enfin, un dossier est consultable sur le site consacré à l’histoire de l’art, Histoiredelart.net, par Thomas Greiss. Il traite justement ici, du  »nouveau langage » artistique adopté à la Renaissance, abandonnant les  »codes » médiévaux. Est de plus soulignée ici l’importance, dans l’évolution constatée, du contexte social et économique, ainsi que des innovations techniques, durant cette période.

Nous verrons que le mythe d’Amour n’a pas fait exception à la règle, et connu une  »renaissance » artistique importante, à partir des XIVème et XVème siècle. Une nouvelle fois, un article de l’encyclopedie Universalis, en accès restreint, permet d’aborder le traitement de l’Amour dans l’Art depuis la Renaissance, publié par George Brunel ( Agrégé de lettres et conservateur des objets d’art des églises de la Ville de Paris).

De plus, pour résumer tout cela, un document est disponible sur le site de l’académie de Strasbourg, traitant de l’Humanisme et la Renaissance, compte rendu issu d’un stage Capes Interne (2008-2009).

Pour aller plus loin, un article de Daniel Arasse (Historien de l’Art français, spécialiste de la Renaissance et de l’Art italien) étudie l’influence de cette nouvelle perception du monde sur l’art de la Renaissance italienne, à travers la redécouverte et réutilisation des symboles antiques.

 

Amour dans l’Antiquité

Pour commencer, nous pouvons reprendre le texte d’Eduardo Ramos-Izquierdo (Professeur à l’Université Paris-Sorbonne IV et membre du Centre de Recherche interdisciplinaires sur les mondes ibériques contemporains) et Angelika Schober (professeur d’histoire des idées et civilisations à l’Université de Limoges), L’espace d’Eros : représentation textuelle et iconique dans lequel est traitée, en première partie, la représentation d’Eros dans l’antiquité, plus particulièrement chez les Étrusques.

C’est dès le Vème siècle avant J.C. que Eros connaît une représentation fleurissante et abondante dans l’art grec.

Eros

Eros, statuette en terre cuite, entre Ier et IVème siècle

Il est représenté nu, ailé, enfant ou adolescent, conformément aux différentes sources mythologiques.

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Eros, ephèbe volant, env. 200 à 180 av. J.-C.

Il apparaît dans l’art antique, plus particulièrement entre le Vème siècle avant J.C. et le IIIème siècle après J.C., sous forme de reliefs, statuettes ou sculptures. En consultant notre galerie Flickr, dans l’album consacré à la représentation d’Amour dans l’Antiquité, vous pourrez trouver un certain nombre de ces spécimens, représentatifs de la période.

De plus, il est parfois accompagné de sa mère Venus, comme dans cette mosaïque du Ier-IIème siècle après J.C., sous l’apparence d’un petit enfant ailé comme sur cette mosaïque datée du Ier-IIème siècle et conservée au Louvre. 

Ou bien paré des attributs de Vénus, tel que le miroir, en simple référence à sa filiation, comme sur cette statuette en terre cuite de 40 av. J.-C. : Eros portant un miroir ouvertOn peut, de même, le trouver accompagné de son frère Antéros.

Eros et Anteros

Eros et Anteros, entre IIIeme et Ier siècle avant J.C.

Il est possible ensuite de consulter sur le site du Musée Louvre la notice d’un médaillon de 250-200 avant J.C, exposé dans la section des antiquités grecques, romaines et étrusques, qui apporte un certain nombre de précisions concernant la période hellénistique, le sujet représenté, la technique employée et la fonction de cet objet.

Pour finir, les photos des oeuvres présentes au musée du Louvre étant protégées, il est uniquement possible de consulter ces oeuvres sur place ou sur le site du Cartel du Louvre. On peut remarquer, rien qu’à travers cette collection, que le personnage d’Amour, Eros ou Cupidon, fût une source d’inspiration importante pour les artistes grecs, romains et étrusques. En effet, rien qu’au Musée du Louvre, près de 50 objets, très divers, représentent le dieu, seul ou faisant partie d’un groupe. Vous trouverez sur notre Flickr, un album rassemblant des représentations dAmour dans l’Antiquité.