L’œuvre de Bouguereau de nos jours

Aujourd’hui encore, l’art de Bouguereau est très déprécié et peu d’historiens de l’art choisissent de s’y intéresser et ce, malgré la popularité de Bouguereau au XIXème siècle (voir notre article La réception des œuvres de Bouguereau au XIXème siècle).

Considéré comme un peintre académique sans autre talent que celui de peindre ce qui avait déjà été fait maintes fois, il est souvent relégué au rang d’exemple lorsqu’est évoquée l’Académie des Beaux-Arts de l’époque. D’autre part, Bouguereau est souvent assimilé à l’art dit « mignon » ou « art du kitsch » du fait de ses nombreuses peintures autour des thèmes amoureux, présentant des enfants ailés et des allégories de l’amour (voir l’album Bouguereau et le thème de l’amour sur notre Flickr). Il est vrai qu’en comparaison avec la modernité des Impressionnistes, il est difficile de déprécier la peinture de Bouguereau qui n’a fait que reprendre ce qui existait déjà et de suivre les codes et les règles de l’Académie.

Néanmoins, quelques historiens de l’art se sont penchés sur le cas de William-Adolphe Bouguereau. Jacques Thuillier (historien de l’art, professeur au Collège de France, membre du Haut comité des célébrations nationales du XXe siècle) écrit un article pour Le centenaire de la mort de Bouguereau où il présente le peintre, souvent décrit comme représentant de la « mauvaise peinture », comme ayant sa place dans l’histoire de la peinture de son époque.

Laurier Lacroix, historien d’art québécois Membre de la société des Dix (2005), élu au fauteuil n°5, écrit pour la revue Vie des Arts (vol. 29, n° 115, 1984) un article intitulé Bouguereau : une question de sensibilité ? publié par le site érudit.org (consortium inter-universitaire à but non lucratif). Il y met en perspective la peinture de Bouguereau par rapport à celle de son époque. Elle y trouverait ainsi sa place et toute sa légitimité, au-delà de toute considération esthétique moderne.

La réception des œuvres de Bouguereau au XIXe siècle

Rêve de printemps, William-Adolphe Bouguereau, 1901

Rêve de printemps, William-Adolphe Bouguereau, 1901

En tant que professeur de l’Académie des Beaux-Arts, William-Adolphe Bouguereau exposait au Salon chaque année et fit même partie du Jury sélectionnant les œuvres dignes d’y être exposées. Le nombre impressionnant de tableaux de Bouguereau traduit bien la popularité du peintre au XIXe siècle, vous pourrez retrouver la quasi-totalité de ses œuvres sur le site Bouguereau-The Complete Works, réalisé par des amateurs de la peinture de Bouguereau et ayant pour vocation de référencer ses œuvres. Bouguereau évolue dans le contexte particulier qu’est celui de l’Académie des Beaux-Arts. A la fin de sa carrière, il sera contemporain du mouvement impressionniste dont il refusera les œuvres au Salon.

Le livre numérisé Les Beaux-Arts dans les deux mondes en 1855 de Etienne Jean Delécluze (peintre et critique d’art français) paru en 1856 chez Charpentier nous permet de dresser le portrait de ce qu’étaient les Beaux-Arts à l’époque de Bouguereau et de distinguer les différents groupements d’artistes que ce soit par spécialité ou par région. William-Adolphe Bouguereau est cité comme appartenant à l’école de Rome et les peintres de portraits.

Dans l’article L’art pompier, un art officiel publié sur le site l’Histoire par l’image (destiné aux enseignants, à leurs élèves et aux amateurs d’art et d’histoire et retraçant  l’Histoire de France à travers les collections des musées et les documents d’archives), Charlotte Denoël (Conservateur des bibliothèques, chef du service des manuscrits médiévaux au département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France) explique le système des Beaux-Arts à l’époque de Bouguereau et évoque la dévaluation progressive de l’art dit pompier par rapport à la peinture impressionniste qui voit le jour à la fin du XIXe siècle.

Bouguereau est de ceux refusant les tableaux des impressionnistes et c’est, entre autre, pour cette raison qu’Emile Zola, fervent défenseur des impressionnistes, critiqua de façon plutôt virulente ses œuvres. Sur le site des Cahiers naturalistes, revue littéraire consacrée aux études sur Zola et le naturalisme, éditée par la Société littéraire des Amis d’Emile Zola, sont répertoriées ses critiques de la peinture de William-Adolphe Bouguereau.

Dans son article pour la Revue française de sociologie (1986, vol. 27, n° 3) numérisé sur la plateforme de revues en ligne Persée, Pierre Favre (institut d’études politiques de Paris) fait le compte-rendu d’un livre de Thuillier Jacques (historien de l’art et professeur au Collège de France, membre du Haut comité des célébrations nationales du XXe siècle) : Peut-on parler d’une peinture «pompier» ?  où il évoque cet art académique qui, même s’il est relativement dévalorisé de nos jours, avait un réel succès au XIXe siècle.

Même si l’histoire aura davantage retenu les grands peintres dits « modernes » ayant participé à l’évolution de l’art, il n’en demeure pas moins qu’à son époque, le système académique et la peinture qu’il soutenait restaient majoritaires. Des peintres comme Bouguereau ou son élève Seignac avait alors une grande popularité.